En ce moment, je passe beaucoup de temps avec les Favreau, une famille de meuniers installée sur les bords de la Sèvre niortaise aux XVIIe et XVIIIe siècles. J’aurais sans doute l’occasion d’y revenir lors d’un prochain article, mais je veux partager ici un acte trouvé au fil de mes recherches.
Il s’agit du décès de Marie Thomas, l’épouse de Charles Favreau meunier au moulin de Mursay, paroisse de Sciecq.
Le moulin de Mursay est à quelques centaines de mètres du château du même nom, là où vécut Agrippa d’Aubigné et où est née Madame de Maintenon. L’un et l’autre ont disparu quand Marie Thomas arrive au moulin en 1752, mais reste l’allée du roi* qui donne accès au château, et qui tient son nom de la visite que fit en ces lieux le futur Henri IV en 1576. Bordée de 80 tilleuls aujourd’hui tricentenaires, elle est imposante et nul doute que les meuniers de Mursay l’empruntèrent quelquefois.
Charles et Marie s’unissent à Niort, paroisse de Saint-André, en 1752. Charles est veuf en premières noces de Louise Chenu, morte en couches à 24 ans.
Sa deuxième épouse, comme la première, est fille de meunier. Après son mariage, Marie Thomas quitte Niort pour s’installer avec son mari au moulin de Mursay. Dès 1753, elle met au monde une fille Marie Renée, puis chaque année un nouvel enfant, presque uniquement des filles (leur seul fils meurt au bout de 15 jours).
Le 23 mars 1760, un nouvelle fille voit le jour, on lui donne le prénom plutôt rare d’Espérance Louise. Hélas ! l’espérance n’est pas du côté de sa mère, puisque moins de 2 mois plus tard, Marie Thomas meurt au moulin de Mursay, peut-être des suites de son accouchement.
C’est le curé Beaulieu, prêtre de la paroisse de Sciecq qui rédige l’acte de décès. Il trouve ici une formule rare (je crois) pour un décès, puisqu’il note : « Marie Thomas est décédée de la veille à 2 ou 3 heures du matin ayant eu le bonheur de recevoir auparavant tous les sacrements de l’église avec pleine connaissance. »
Marie Thomas n’a que 30 ans lorsqu’elle décède, avoir le bonheur de mourir à 30 ans n’est peut-être pas la première pensée qui vient à l’esprit…
Cependant, pour le curé Beaulieu, elle était consciente et a pu recevoir l’extrême-onction, sacrement essentiel pour espérer rejoindre le Paradis. Pour lui, mourir jeune, c’est aussi quitter tôt un monde fait de labeur et de nombreuses épreuves pour accéder au Royaume des Cieux et à la béatitude.
Pourtant, Marie aurait sans doute bien aimé passer quelques années de plus sur cette terre, elle qui avait prénommé sa dernière fille Espérance.
* C’est cette allée qui a inspiré à Françoise Chandernagor le titre de son livre sur la vie de Madame de Maintenon, L’allée du roi.
Le destin des humbles près de celui des « grands ».
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Je côtoie les humbles bien plus souvent que les grands !
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Moi aussi. Et c’est finalement plus agréable.
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